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Rabat, Maroc – "Dans une tentative désespérée de la forcer à se marier, une mère a prévenu sa fille que refuser la proposition entraînerait l'emprisonnement injuste de son père", a déclaré Fatima-Zahra à propos d'une jeune fille mariée à l'âge de 14 ans à Khénifra, Maroc.

Fatima-Zahra se souvient de multiples histoires vécues aussi bien dans sa ville natale de Midelt qu’à Tinghir, Khénifra ou d'autres localités où de nombreuses familles croient à tort que marier leurs filles très jeunes leur procure une meilleure protection contre la pauvreté, les grossesses hors mariage et les abus.

"J'ai été très heureuse de participer aux consultations et de constater que la voix des filles est effectivement entendue par les décideurs", a déclaré Fatima-Zahra, qui a pris part à une série de consultations nationales visant à impliquer les filles dans la réforme actuelle du Code de la famille.

Initiées par le Centre international de la diplomatie (ICD), ces consultations ont fourni, avec le soutien de l’UNFPA, une plate-forme permettant à ces jeunes filles de faire entendre leur voix, garantissant ainsi que leurs préoccupations et leurs attentes soient prises en compte dans le processus des réformes.

Une nouvelle vague de changement

En février 2004, le code de la famille au Maroc, également connu sous le nom de la Moudawana, a été adopté. La Moudawana a introduit des lois progressistes visant à protéger les droits des femmes et des enfants et à promouvoir les principes de justice et d’égalité.

Près de vingt ans après son adoption, de nombreux obstacles subsistent, rendant difficile la mise en œuvre et l'application complètes du code. L’un des défis les plus persistants est le mariage d’enfants. Selon des données récentes, environ 14 % des filles au Maroc sont mariées avant l'âge de 18 ans. Le mariage d’enfants reste répandu, en particulier dans les zones rurales où les taux de pauvreté sont élevés et où l'accès à l'éducation est limité.

Les conséquences du mariage d’enfants sont considérables et ont un impact sur le bien-être physique, émotionnel et social des jeunes filles. Parmi les défis majeurs, figure l’interruption de l’éducation. Ces jeunes filles mariées sont souvent contraintes d’abandonner l’école, les privant ainsi de la possibilité d’acquérir les connaissances et les compétences nécessaires à un avenir meilleur. Cela perpétue le cycle de la pauvreté et limite leur potentiel de croissance personnelle et professionnelle. De plus, les épouses-enfants sont confrontées à des risques accrus pour leur santé en raison des grossesses ou des accouchements précoces. Selon des statistiques récentes, le taux de grossesses chez les adolescentes au Maroc reste élevé. Rien qu’en 2021, environ 22 naissances ont été signalées pour 1000 filles âgées de 15 à 19 ans.

Les voix des filles comptent

"Lors des consultations, j'ai plaidé pour le maintien de l'âge légal du mariage à 18 ans sans exception", a déclaré Fatima-Zahra.

En juin 2023, plus de 40 jeunes filles ont participé aux consultations nationales et de multiples amendements ont été transmis aux décideurs du ministère de la Justice, du ministère de la Solidarité, de l'Intégration sociale et de la Famille, du Conseil national des droits de l'homme, des groupes parlementaires et d'autres acteurs, notamment les organisations de la société civile.

Au cours de ces consultations, des jeunes filles ont apporté leurs perspectives et expériences uniques, mettant en lumière les conséquences néfastes du mariage d’enfants et plaidant pour son éradication.

En plus de la question du mariage d’enfants, ces consultations ont également abordé d'autres préoccupations pressantes des jeunes filles, telles que l'accès aux soins de santé, les droits reproductifs et l'égalité des sexes. En participant activement à ces discussions, les jeunes filles ont non seulement fait entendre leur voix, mais elles ont également incité les décideurs à donner la priorité à leurs droits et à leurs besoins.

En septembre 2023, le roi Mohammed VI a adressé une directive au chef du gouvernement soulignant la nécessité de réviser le code de la famille marocain. Cet appel puissant à l’action demandait la soumission rapide de propositions d’amendement, qui devraient être formulées après des consultations approfondies dans un délai n’excédant pas six mois, impliquant plusieurs institutions et organes concernés.

Un engagement fort pour l’autonomisation des filles

Le Maroc déploie des efforts louables pour assurer le développement et l'autonomisation des filles, reconnaissant leur potentiel en tant qu’actrices clé du développement durable du pays. Des efforts ont été déployés pour réduire l'écart entre les sexes dans l'éducation, améliorer la santé et le bien-être des filles, lutter contre le mariage d’enfants et promouvoir le droit des filles à prendre des décisions concernant leur propre corps et leur avenir. Diverses initiatives ont également été lancées pour améliorer les compétences des filles et leur offrir des opportunités de formation professionnelle et d'entrepreneuriat.

Déterminé à soutenir ces efforts, l'UNFPA soutient les programmes et initiatives visant à soutenir le potentiel des adolescentes et des jeunes filles, en leur fournissant un accès à des services d'éducation et de santé de qualité, des informations sur la santé reproductive et un soutien à des modes de vie sains. Des efforts conjoints sont également consacrés à la protection des droits des filles contre les pratiques néfastes et autres formes de violence basée sur le genre, leur permettant de faire des choix éclairés concernant leur avenir.